Polyglossie

Calligraphie chinoise et japonaise - Humeurs d'un polyglotte

lundi, janvier 15, 2007

Les traits

Une discussion récente sur les subtilités de la réalisation des traits m'a fait réaliser un manque impardonnable sur ce blog : je ne vous ai pas présenté mes traits. Ils sont mes composantes de tout caractère, il n'y a rien d'autre qu'eux, ils sont omniprésents et omnipotents, et pourtant si dociles et polymorphes. Ils forment tout, ils disent tout, et ils sont tout. Un traité de calligraphie composé par un vrai Maitre calligraphe vous donnerait tous les détails, les précisions dont je suis incapables, mais ce ne serait pas mes traits. Je laisse mon imperfection parler pour moi, en gage de sincérité. Alors je prends le risque de dévoiler ma maladresse, et je rassemble en deux images l'ensemble des traits qui composent mon univers.

Le point.
Poser le pinceau en un léger mouvement stoppé immédiatement, faire légèrement glissé sur le côté, vers la droite, en pivotant un peu, et marquer l'arrêt. On peut ensuite soit relever le pinceau bien à la verticale, en ne laissant aucune trace, soit suggérer la direction de l'enchaînement, levant le pinceau de façon contrôlée afin de ne laisser glisser que les derniers poils de la pointe sur le papier. Trois points solidement formés, intenses, le premier arrêtant net le mouvement, les deux autres prolongeant le souffle...

Le trait horizontal.
Poser la pointe du pinceau afin de former un angle de 45 degrés sans pour autant laisser l'encre faire de tache, puis glisser le pinceau fermement, en un mouvement régulier et assuré, marquer l'arrêt, soulever à peine le pinceau en montant légèrement et abaisser avec force et douceur jusqu'à former une belle conclusion au bout du mouvement, puis ramener vers l'intérieur en soulevant le pinceau et terminant le mouvement en l'air.

Le trait vertical.
Celui de droite est bien planté, avec un arrêt final. Le deuxième à droite se termine en relevant vers la fin du développement sans perdre l'axe, le souffle se fondant dans l'air juste au dessu de la feuile. On peut choisir de garder la symétrie ou on peut préférer un axe décallé vers la gauche.

Le trait vertical à crochet.
Les deux traits verticaux en bas à gauche se termine en déplaçant le pinceau vers la gauche lors de la conclusion, après avoir marqué l'arrêt sans appuyé. Le crochet et plus ou moins long et plus ou moins pointu selon la composition du caractère et l'école de calligraphie.

Le trait de revers.
Le terme est de moi, car il se fait de gauche à droite en remontant, montré en haut à gauche en deux inclinaisons différentes. Faire une attaque claire, et engager le mouvement vers la droite et légèrement vers le haut sans excès. Sa longueur dépendra de la composition du caractère, et il est en princippe suivi d'un enchaînement avec un trait oblique gauche. On peut plus ou moins soutenir l'épaisseur du trait, cela dépend de l'angle du trait qui est enchaîné.

Le trait oblique gauche.
A gauche, au milieu, on applique au mouvement une direction vers la gauche, maintenant l'axe sur la partie haute du trait, sans faire d'arrêt pour la conclusion. Il convient de ne pas céder la pression trop tôt, car il faut maintenir l'épaisseur du trait jusqu'au relâchement final.

Le trait enchaîné à l'angle.
Il faut surtout faire attention de penser et ressentir ce trait en un seul souffle, mais en deux temps : un trait horizontal court, avec un temps d'arrêt bien marqué, et ensuite prendre ce temps d'arrêt comme le départ du deuxième temps. Il existe en deux versions, selon la direction de la deuxième partie, qui elle se réalise comme un trait vertical avec arrêt ou comme un trait oblique gauche.

Le trait oblique à droite.
Selon les écoles, il peut avoir des visages assez différents. En princippe, il suffit de démarrer doucement, et de marquer fortement un arrêt en appuyant sur le pinceau jusqu'au ventre, et relâcher la pression en balayant lentement vers la droite dans une direction plus horizontale et en levant le pinceau. Le début du trait peut être plus ou moins galbé selon les écoles, voire ne pas avoir du tout ce petit coude de départ.

3 Comments:

At 23:48, Anonymous Anonyme said...

Merci Elie , ils sont superbes des traits ; le rêve de tout débutant !
Fabienne Verdier raconte dans son bouquin qu'elle était assez satisfaite de ses calligraphies de caractères complets. Mais lorsqu'elle a rencontré un maître de calligraphie celui ci lui a demandé de tout oublier, pour ne faire que des traits pendant des mois !
Le temps d'apprendre, dans une époque qui veut tout faire plus vite ...

 
At 22:00, Blogger ElieDeLeuze said...

Aussi fascinante soit l'expérience de Fabienne Verdier, j'oserai dire que comme tout débutant, elle devait avoir une technique archi nulle. Apprendra les bases de la techniques sont un passage obligé, et on ne peut pas le faire tout seul. Il faut un expert compétent pour voir ce que le débutant ne voit pas. Bref, Fabienne Verdier a dû faire des traits pendant un moment parce qu'elle était nulle au début, rien d'extraordinnaire à cela.
En même temps, ce témoignage banal d'un point de vue de ceux qui pratiquent la calligraphie, est en effet une leçon de patience laborieuse pour un lectorat occidental à qui on apprend à ne pas en avoir. Il faut faire confiance au temps.

 
At 13:44, Anonymous Anonyme said...

Merci pour ce blogue, sa poésie vivante, ses billets instructifs et beaux comme des fenêtres...

 

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